Interview de Michel Hue, Conservateur départemental du patrimoine et des musées / Flaran
Questions à Michel Hue, Directeur de la Conservation départemental du patrimoine et des musées/Flaran, Conservateur départemental du Gers.
« Il est essentiel d’agir pour le désenclavement culturel »
Michel Hue a pris son poste au Conseil départemental en tant que conservateur du patrimoine en 1995, année de la signature de la convention de partenariat culturel entre l’État et le Département qui acte la création de la Conservation départementale du Patrimoine et des Musées.
Quelles sont vos missions en tant que conservateur du patrimoine dans le Gers ?
À mon arrivée en 1995, ma première mission, conformément à la convention, concernait la direction scientifique du réseau des musées publics gersois. S’y est ajouté très vite un gros travail de diagnostic et d’inventaire qui n’avait jamais été réalisé et enfin, le regroupement de tout ce qui concernait le Patrimoine au sein d’un seul service, puis dès 2000, en un seul et même lieu avec la prise de la direction de l’abbaye de Flaran, dans une logique culturelle à vocation touristique.
Aujourd’hui, j’anime avec une équipe de 20 personnes un réseau de dix sites et musées, dont le site de Flaran, labellisé « Grand Site Occitanie ». Grâce à ce réseau très complémentaire, riche et diversifié (selon notre formule), nous couvrons une période qui va de la préhistoire à l’époque contemporaine et l’ensemble du territoire à travers une programmation annuelle d’expositions et d’animations. Le service de médiation pilote des actions éducatives et de diffusion auprès des scolaires et du grand public. Nous avons également une activité d’édition en lien avec le patrimoine départemental et notamment l’édition de catalogues d’exposition. Les acquisitions d’œuvres font aussi partie de mes missions. Elles ont permis de constituer ces 20 dernières années une collection départementale de 300 œuvres.
Comment qualifieriez-vous le cœur de votre métier ?
La valorisation des collections et du patrimoine, est le cœur de notre métier. Elle permet de toucher un large public et d’assurer l’égalité d’accès à la Culture, constante de la commande départementale, par une programmation d’expositions temporaires à rotation rapide et d’animations pédagogiques qui renvoient sur tous les cantons à partir de Flaran. Depuis 23 ans, 40 à 50% de notre programmation est dédiée, par exemple, à l’art contemporain avec, aussi, cette volonté de faire connaître les artistes locaux. On joue sur les deux tableaux, avec des artistes reconnus nationalement et des artistes gersois. La plate-forme de Flaran nous permet de concevoir des expositions, de les déposer sur un musée récipiendaire et de les faire tourner au sein de notre réseau. Cela permet de toucher un large public et de travailler en ingénierie culturelle et mutualisation sur l’ensemble du territoire. Sans oublier les animations scolaires, avec près de 5 000 élèves accueillis chaque année.
Comment rendre la culture attractive en milieu rural ?
Il est essentiel d’agir pour le désenclavement culturel, à travers notamment les actions d’animation culturelle et de médiation. L’abbaye de Flaran est un site rural excentré par rapport à Auch. Il faut donner envie aux gens de venir. Nous avons pour cela développé aussi le pôle « accueil » afin d’élargir le champ horaire qui nous permet d’ouvrir le site tous les jours et toute l’année. Nous avons également fixé une politique tarifaire raisonnable, avec un tarif unique de 5 € pour accéder au site et aux expositions. L’intérêt était aussi d’allonger le temps de visite sur le secteur. Aujourd’hui, le public a pris ses marques, qu’il s’agisse des Gersois ou des visiteurs de passage, voire même des autres nationalités car le panel de notre fréquentation est proche des grands musées régionaux . Il est important de faire savoir tout ce que fait le Département pour faire rayonner la culture en milieu rural, de ce point de vue notre collectivité n’a pas à rougir!.
Depuis 2002, vous faites vivre les oeuvres confiées par Michael Simonov. Pouvez-vous nous parler de cette collection?
Le collectionneur britannique Michaël Simonov cherchait un lieu pour montrer sa collection de peintures et de sculptures. Lors d’une visite, il a eu le coup de foudre pour l’abbaye de Flaran et a décidé de confier sa collection au Département, soit plus de 300 chefs-d’œuvre couvrant la période du XVIe siècle au XXIe siècle. La qualité de ces tableaux et sculptures nous a conféré une responsabilité. Il a fallu aménager un espace de 400 m2 aux normes muséographiques européennes pour accueillir cette collection dont nous dévoilons les œuvres au fil des thématiques lors des expositions temporaires biannuelles. L’abbaye de Flaran s’est ainsi faite une réputation à l’international grâce à cette collection, dont nous prêtons les œuvres sur demande à des musées dans le monde entier. C’est une des plus grandes collections privées déposées dans un établissement public sur une si longue durée. Pour nous, c’est une source pédagogique incommensurable et une cerise sur le gâteau en matière de fréquentation.